12h13 le 12 février 2024
Attilio réfléchit à un moyen de couper ce bâton de colle en deux. La solution qu’il a trouvé aujourd’hui c’est de juxtaposer deux règles…
13h40 le 15 décembre 2023
Ce matin, Léon et Corentin, ont présenté leur projet foot. L’objectif: trois semaines d'entraînement avec comme finalité un match. Ils ont prévu de s'entraîner tous les midis et aujourd’hui ils s’exercent à mener des actions collectives pour aller jusqu’au but en passant la balle à tous les membres de l’équipe.
15h01 le 5 février 2024
Thiago est à l’initiative d’un projet chorégraphique qui a trouvé l’engouement de plusieurs de ses camarades.
La régie 2 et les points de vue multiples (septembre 2024)
La régie 2 est un espace intermédiaire entre la salle verte, la salle bleue, la salle jaune et la salle mauve. On y range du matériel pour les activités manuelles, sportives et autres. On y trouve également un lavabo souvent utilisé pour le nettoyage du matériel.
Je me trouve dans la salle verte. J’entends des bruits de dispute, et dans l’encadrement de la porte, je vois Oubaye qui commence à pousser Zoé. Il tremble, les larmes aux yeux, et je m'inquiète qu’un coup parte. J'interviens donc en m’interposant. D’ordinaire, les facilitateurs interviennent le moins possible : les étudiants ont des outils qu’ils peuvent utiliser eux-mêmes, comme le message clair. Mais à cet instant précis, je juge préférable de jouer le rôle de médiateur.
Tout le monde se met à parler en même temps pour donner ses explications. J’organise donc un petit cercle restauratif improvisé. Cet exercice permet à chacun de parler à son tour et de s'assurer que son propos est bien entendu par les autres. Une fois que quelqu’un s’exprime, nous demandons à celui qui écoute de répéter ce qu'il a entendu. Cette méthode, issue de la Communication Non Violente, demande beaucoup de confiance dans le processus, car il faut accepter d’écouter l’autre alors que nous avons tous une forte envie de faire entendre notre propre point de vue. Dans ces moments-là, on a l’impression que notre vécu est le plus important, souvent empreint d’un profond sentiment d’injustice. Comme l'a dit Marshall Rosenberg : « Derrière chaque action violente se trouve une émotion non reconnue. » Si nous n'acceptons pas de différer notre expression pour d'abord écouter, alors aucune communication n'est possible. Le conflit éclate lorsque chacun veut être entendu en même temps.
J’essaie donc d’organiser la prise de parole, mais Oubaye (8 ans) est sur le point d’exploser et peine à se contenir. Je sens bien que mon intention doit être profondément aimante, sinon il ne tiendra pas. Il a besoin de sentir ma bienveillance pour réussir à se maîtriser.
Je donne d’abord la parole à Samuel (5 ans), qui est toujours sur un marchepied au lavabo.
Samuel : "J’étais en train de me laver les mains et Oubaye est arrivé et m’a bousculé."
Moi : "Comment tu t’es senti à ce moment-là ?"
Samuel : "J’étais très en colère, parce que je n’avais pas fini et qu’il m’a bousculé."
Je demande à Oubaye de reformuler ce qu'il a entendu, et je m’assure que Samuel se sent bien compris, ce qui est le cas. C’est ensuite au tour d’Oubaye de s’exprimer :
"Quand je suis arrivé, j’ai cru que Samuel avait fini. J’ai donc voulu prendre sa place, mais il m’a crié dessus et ça m’a mis très en colère. Je n’aime pas qu’on me parle comme ça, ça me rend triste."
Je guide Samuel pour qu'il reformule ce que Oubaye vient de dire, ce qui prend du temps car il est encore jeune et cela reste difficile pour lui. Mais petit à petit, nous nous assurons que Oubaye se sente compris. Cependant, quelque chose reste en suspens.
Moi : "Et qu’est-ce qui s’est passé avec Zoé ?"
Oubaye : "Elle est arrivée et, sans savoir ce qui s'était passé, elle m’a crié dessus pour défendre son frère. C’est injuste parce qu’elle n’était pas là et ne pouvait pas savoir."
Je demande à Zoé de reformuler ce qu’elle entend et d’expliquer son point de vue :
Zoé : "Quand je suis arrivée, j’ai vu Oubaye pousser Samuel, et j’ai voulu défendre mon frère."
Moi : "Tu as pensé que ton frère était attaqué et tu as voulu l’aider. Tu as crié pour que Oubaye arrête ?"
Zoé : "Oui, c’est ça."
Oubaye reformule à son tour. Peu à peu, je vois tous les corps se détendre à mesure que chacun comprend le point de vue de l’autre. Les sensations d’injustice étaient réelles, et c’est en les accueillant telles quelles que nous avons pu apaiser la situation. Chacun a pu repartir serein, car chacun s’est senti entendu, moi y compris. Ce genre de médiation ne se déroule pas toujours aussi facilement, mais cette fois-ci, elle a porté ses fruits.
Chacun d’entre eux souffrait à sa manière. Plutôt que de partir avec de la frustration ou de la rancœur, nous nous sommes quittés grandi de cet échange. Ce type de moment est enrichissant pour tous, et quand un individu est apaisé, le collectif en bénéficie aussi. L’énergie de chacun rayonne sur le groupe.
Je voudrais aussi souligner que j’étais moi-même en souffrance à ce moment-là. Voir des enfants, quel que soit leur âge, se crier dessus est difficile. Je leur suis reconnaissant de m’avoir fait suffisamment confiance pour s’engager dans cet exercice. Une autre fois, ce sera peut-être moi qui aurai besoin d’aide pour me décaler de mon point de vue et percevoir celui de l’autre.
Pouvoir vivre cet apprentissage est une véritable chance. Certes, je ne peux pas faire grand-chose contre les guerres qui sévissent dans le monde, mais je peux agir sur mes propres conflits et sur ceux auxquels je participe.
"La paix est présente ici et maintenant, en nous et dans tout ce que nous faisons et voyons. La question est seulement de savoir si nous sommes en contact avec elle. Nous n'avons pas besoin de voyager loin pour y accéder. Nous avons seulement besoin de regarder à l'intérieur de nous-mêmes, de respirer profondément et de laisser aller l'agitation."
Thích Nhất Hạnh "La Paix à chaque pas"
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