11h04 le 18 décembre 2023
C’est l’heure de la réunion à l’école démocratique Ébroïcienne. A cette époque là, elle a lieu à 11hoo chaque jour.
Aujourd’hui, c’est Noé qui préside la séance pour donner, entre autres choses, les points qui ont été inscrits à l’ordre du jour sur la feuille de réunion.
Noé et le Mécontentement qui Peut Avoir du Sens (mai 2024)
Dans notre école, le rangement et le ménage sont réalisés par les enfants et les facilitateurs. A cette époque là, nous avons instauré un système de rotation hebdomadaire entre deux groupes. Cependant, en cas d'absences nombreuses, un groupe peut se retrouver en sous-effectif, ce qui complique l'accomplissement des tâches.
Un jour, face à ce problème, j'ai demandé à ceux qui jouaient dehors de venir nous aider, malgré le fait qu'ils soient normalement en repos ce jour-là. Cette décision a suscité du mécontentement dans le groupe, notamment chez Noé, qui a inscrit ce point à l'ordre du jour de la réunion. Il a ainsi pu exprimer son désaccord :
« Je me sens en colère car l’autre jour Arnaud est venu nous chercher dans la cour pour faire le ménage alors que c’était notre jour de repos! »
Avec du recul et du repos, j'ai pu reconnaître mes torts :
« Oui, c’est vrai Noé, j’ai fait ça et je reconnais que j’ai injustement usé de mon autorité. J’étais fatigué et l’idée de faire le ménage à trois alors que vous vous amusiez dehors m’a paru inconcevable.»
Nous avons ensuite débattu de la situation. J'ai soulevé la question de l’équité dans la répartition des tâches en cas d'absences nombreuses :
« Comment fait-on lorsque certains se retrouvent avec une tâche trop lourde à accomplir ? »
Une discussion collective a suivi, conduisant à la proposition que chacun, lors de la réunion matinale, anticipe les absences et s'assure que tout se déroule bien en fin de journée. Cet échange a permis à chacun de se sentir entendu et de co-construire une solution.
Après la réunion, j'ai partagé mon contentement avec Noé :
« C’était vraiment intéressant ce moment de travail commun, n’est-ce pas Noé ? »
Il a répondu :
« Oui c’est vrai, pourtant cela partait d’une colère pour moi, de quelque chose de désagréable ! »
J'ai souligné l'importance de son intervention :
« Oui et tu as vu comment cela a profité à tout le groupe, je te remercie vraiment de l’avoir fait. »
Et il a répondu avec une expression d’intense satisfaction:
“Mais en fait cela peut servir à quelque chose.”
Selon moi, il réalisait que ses sentiments, même durs à vivre, pouvaient avoir un sens et contribuer à la vie du groupe.
Ce jour-là, Noé, qui refusait habituellement de faire ses rituels d'écrits, a décidé d’écrire une petite histoire. Nous étions tous deux satisfaits et connectés, au point que je lui ai proposé de corriger son texte pour qu'il puisse le recopier et le présenter à 16h00 au moment de la Présentation. Il a accepté et a également fait son rituel de numération, une première depuis des semaines.
Cette expérience nous a beaucoup appris. J'ai moi aussi constaté que mes erreurs pouvaient générer du lien et que mes propres imperfections pouvaient elles aussi mener à des moments de beauté et d’accomplissement. Bien que Noé ait parfois repris sa posture de refus, nous avons gagné en confiance mutuelle et je vois que ce qui progresse en relation nous donne de la force de nous confronter à ce qui est difficile pour chacun de nous deux.
Je constate à nouveau que le sentiment de sécurité et de confiance est nécessaire pour accéder à des niveaux de concentration et d’implication. En cela, cette expérience fait écho à la pyramide des besoins de Maslow. Selon cette théorie, les besoins de base comme la sécurité et le sentiment d’appartenance doivent être satisfaits pour permettre à un individu de s’épanouir pleinement et d’atteindre les niveaux supérieurs de développement personnel, tels que l’estime de soi et l’accomplissement.
Dans notre cas, en instaurant un climat de confiance, nous avons permis à Noé de dépasser ses blocages et de s’engager plus pleinement dans les activités du groupe. Quant à moi j’aurais l’esprit tranquille au moment du ménage car je sais que le groupe va se soucier des manquement, au moins à cet endroit.
« Si vous planifiez délibérément d’être moins que ce dont vous êtes capable, alors je vous avertis que vous serez profondément malheureux pour le reste de votre vie. Vous éviterez de réaliser votre propre potentiel. »
Abraham Maslow
"Vers une psychologie de l'être"
Commentaires
Enregistrer un commentaire